Son âme a été trempée dans des océans de lumières après avoir été soigneusement gardée dans des niches du ciel, toutes faites de sainteté et de sublimité.
Venu sur terre, les anges, sur ordre du Seigneur, lui ont fait subir une opération pour extirper un bout de chair noirâtre, de son cœur. Comme pour dire qu’il a été dépossédé de tout ce qui fait la bassesse de notre espèce. De toutes les vertus supérieures il était l’incarnation parfaite :
Plus juste que lui, il n’y en a pas. Pas qu’il aimait la justice mais que sa nature même était incompatible avec l’injustice. La seule fois où il a piqué une colère noire, fut le jour où, un bédouin, non content de sa décision, eut le toupet de lui dire d’un air narquois : « Sois juste Mouhammed ! ». Ce fut comme si toute la galaxie lui tombait sur les épaules. Il le regarda dans les yeux et lui lança sa célèbre phrase : «Qui donc peut être juste, sur cette terre, si je ne le suis pas ».
L’âme de Mouhammed(PSL) est pétrie de justice et imbibée d’équité. L’injustice le révoltait et l’arbitraire l’agaçait. Il répugnait le népotisme et frémissait devant le favoritisme. Il détestait l’incurie et combattait l’impunité. « Si Fatima ma fille avait volé je lui aurais coupé la main», avait –il clamé du haut de son minbar pour que nul n’en ignorât.
Il était véridique dans ses moindres faits et gestes. Quand il se tait l’univers retient son souffle, car son silence est méditation. Mais dès qu’il ouvre la bouche la plume l’histoire pointe son nez car toutes ses paroles sont vectrices de grandeur et source d’élévation.
Humble, il répugnait la fanfaronnade, abhorrait la vanité et rejetait l’arrogance. Il n’aime qu’on le considère plus qu’un homme. A un bédouin tétanisé par sa présence et fasciné par sa personnalité forte et déconcertante, il dit : « Arrête! Je ne suis pas plus que le fils d’une pauvre dame de Khouraich qui se nourrissait de viande sèche ». Même son exaltant voyage nocturne suivi de son ascension aux coins les plus reculés du ciel ne le grisa pas outre-mesure. Dès le lendemain, il enfourche son baudet pour vaquer à ses occupations. Lucifer(Iblis) même ne put s’empêcher, avec un brin d’admiration, d’avouer que ses diableries sont inopérantes face à un homme de cette trempe.
Ni haineux, ni rancunier. Il était le modèle achevé de la tolérance, de la miséricorde et de l’indulgence. Trait de caractère important pour que le Ciel le marque dans son Journal Eternel : « Par une miséricorde de Dieu, tu as été indulgent à leur égard ; si tu avais été rude et dur de cœur, ils se seraient écartés de ton entourage » S. Ali Imran V. 159.
Sobre, il n’était ni extravagant ni cupide. Cela, parce que chez cet homme, l’immatériel l’emporte sur le matériel ; le souffle divin qui alimente son âme dominant majestueusement la poignée d’argile qui compose son être. C’est, peut-être cela, le secret de son incorruptibilité voire son invincibilité face aux contingences de l’existence et les vicissitudes de la vie.
Il a toujours déjoué les traquenards du diable et repoussé les assauts de la passion. Il n’a jamais cédé aux délices du pouvoir ou abdiqué devant une quelconque tentation.
Peu avant sa mort, et en dépit de la maladie qui l’a physiquement fragilisé, il réunit son peuple pour lui tenir un discours d’adieu. Il dit à ses compagnons : « Si j’ai jamais frappé quelqu’un d’entre vous, me voici, qu’il me frappe à son tour ! Si j’ai outragé quelqu’un de parole, me voici qu’il me rende injure pour injure Si j’ai pris à quelqu’un son bien, me voici, qu’il prenne tout ce que je possède en propre sur terre ! Et ce ne sont pas là de vaines paroles ; que nul, en se faisant ainsi justice, n’appréhende ma colère! La colère et la vengeance ne sont pas dans mon caractère ! ». Un homme osa sortir de la foule et lui réclamer une dette cachée ! « Prends, dit le Prophète ; mieux vaut rougir dans ce monde devant les hommes de son injustice, que d’en rougir devant Dieu dans l’autre monde ».
Voilà le Prophète de l’Islam qui a enseigné les vertus plus par son comportement que par son discours. Il ne récitait pas le Coran ; il était la traduction, l’incarnation humaine du Coran. C’est donc à juste qu’il soit érigé au statut de modèle supérieur de l’humanité. Et toutes les sphères de civilisation ont marqué leur accord sur ce choix. Goethe au nom de la conscience de l’Occident judéo-chrétien exprimait son adhésion: « si tel est l’Islam ne sommes-nous pas tous des musulmans ? »
Et Gandhi, porte-voix de l’Orient polythéiste, de renchérir : « les paroles de Mouhammed constituent un trésor de sagesses non seulement pour les musulmans mais aussi pour l’humanité tout entière ».
Ce qui est étonnant ce n’est pas la réussite de Mouhammed(PSL), ce qui est étonnant c’est qu’il eut réussi avec les moyens dérisoires qui étaient les siens. Dès lors on ne peut qu’admirer la franchise de Lamartine quand il dit : « si la grandeur du dessein, la petitesse des moyens et l’immensité du résultat sont les trois mesures du génie de l’homme, qui ose comparer humainement un grand homme de l’histoire …à Mouhammad ».
Le sens du Mawlid que nous célébrons, ce ne sont ni les festivités hautes en couleur, ni les copieuses collations, mais le fait de revisiter les sublimes enseignements et le comportement exemplaire de ce grand Prophète pour en faire notre viatique au cours de notre éphémère passage sur cette terre.
Cheikh Tidiane SARR